Programmes de recherche et réseaux en cours
ANR -INÉGALITÉS, RADICALITÉS ET CITOYENNETÉS FÉMININES :
RELIGIOSITÉS ISLAMIQUES CONCURRENTIELLES, MAGHREB/AFRIQUE DE L’OUEST ISLAMISÉE – RIMA
Porté par l’IMAF (UMR 8171/243), le projet RIMA regroupe 11 chercheur.e.s d’Afrique (Mali, Côte d’Ivoire, Sénégal, Maroc), d’Amérique du nord, d’Asie et d’Europe. Pluridisciplinaire (anthropologie, sociologie, histoire, géographie, science politique et linguistique), il porte sur les femmes de l’espace Maghreb/Afrique de l’ouest islamisée et vise à étudier comment celles-ci, face aux diverses discriminations qu’elles subissent (inégalités de genre, territoriales, ethniques, économiques, religieuses), réagissent, luttent et/ou militent par le biais de l’islam. Décliné en 3 axes thématiques (affirmation par la pratique religieuse; radicalisations religieuses des femmes ; combativité civique des femmes par le religieux) RIMA a pour ambition d’appréhender la façon dont les femmes, dans le contexte contemporain de la crise djihadiste au Sahel, réinventent leur vie et leur environnement social via la religion. À partir de l’Algérie, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Ghana, du Mali, du Maroc, du Nigeria et du Sénégal, il permet de réfléchir aux normes de religiosités, contrastées et parfois radicalisées que les femmes mobilisent, s’approprient et mettent en œuvre, pour lutter contre les inégalités dont elles souffrent et imposer leurs identités de croyantes et de citoyennes.Novateur par l’aire géographique étudiée (Maghreb/Afrique de l’ouest islamisée) définie comme entité sous-régionale historique; par la prise en compte des autres religions ; et par l’étude de la violence au Sahel par le prisme des femmes, RIMA repose sur une équipe junior et sénior, grande connaisseuse des terrains abordés, dont les membres collaborent depuis longtemps ensemble.La méthodologie ethnographique (enquêtes de terrain qualitatives, entretiens, observation participante) sera complétée par une étude des matérialités et par des portraits de femmes. Une approche visuelle sera utilisée comme outil (filmages, photos, dessins) et comme objet d’observation. Le projet RIMA aura des impacts dans le domaine scientifique : il permettra le renouvellement et le transfert des connaissances, relèvera le défi de la coproduction de savoirs en vue d’appréhender au mieux les grands enjeux sociaux et politiques à venir des pays islamisés de la sous-région.Plusieurs actions de valorisation de la recherche seront organisées : un workshop (Montréal), un colloque final (Casablanca) ; des publications en français et en anglais déposées dans ORCID. Il aura des retombées en termes de transfert de connaissances, notamment en Afrique : participation à la formation d’étudiant.e.s (masters, doctorat) français, canadiens et africains; 2 universités d’été (Bouaké et Dakar) ; 1 atelier d’écriture en collaboration avec les Cahiers d’études africaines. Il aura aussi un impact sur le monde social et associatif grâce à la participation d’associations de défense des droits des femmes (religieuses et civiles), qui dialogueront avec les chercheur.e.s du projet. Enfin RIMA intéressera les pouvoirs publics, en termes de savoirs et d’expertises. L’impact attendu est de répondre aux questionnements de divers acteurs (politiques, économiques, ONG, programmes de développement : G7Sahel, OCDE, UNESCO, etc.) sur les tensions contemporaines autour des pratiques de l’islam et des clivages sociaux dans la zone Afrique de l’ouest islamisée/Maghreb, et de mettre en avant le rôle des femmes dans les transformations sociales.
L’expertise réalisée pourra servir de base à des politiques publiques locales, mais aussi aux acteurs de la société civile impliqués dans des associations qui auront, grâce aux résultats fournis, une vision globale de ces problématiques dans la sous-région.
Coordination scientifique : Fabienne Samson (IMAF)
ANR SCIOUTPOST- AUX AVANT-POSTES DE LA SCIENCE :
COMPARER LES INFRASTRUCTURES SCIENTIFIQUES AUX MARGES DE LA FRANCE D’OUTRE-MER – SCIOUTPOST
Depuis les années 1970, les sciences sociales ont analysé la science comme un ensemble de pratiques sociales historiquement et géographiquement situées, une approche qui a transformé notre vision de la production scientifique. SciOUTPOST met en lumière les lieux scientifiques aux marges des territoires d’outre-mer hérités de la conquête coloniale. Ce projet propose de théoriser le concept d’”avant-poste scientifique” et de le tester pour caractériser les lieux qui ne sont ni des centres de calcul ni des sites de terrain, qui sont permanents, éloignés, et relativement autonomes, et où les modes de vie temporaires entremêlent vie privée et vie professionnelle intensive, scientifiques et non-scientifiques. Enfin, ces pratiques excluent les éventuels savoirs locaux et produisent un savoir universel exclusif. Ce projet sera mené de manière interdisciplinaire, en croisant les approches des STS, de la sociologie politique, de l’anthropologie, de la géographie et de l’histoire. En outre, SciOUTPOST favorisera les échanges avec les spécialistes des sciences naturelles travaillant dans ces infrastructures. Chaque étude de cas sera réalisée par une combinaison de travail de terrain (observation in situ, histoires de vie, entretiens) et d’étude d’archives, toujours guidée par le cadre conceptuel partagé.
Le concept d’avant-poste sera testé en étendant progressivement la comparaison, d’une première étape déjà explorée entre les centres de lancement spatiaux en Algérie, les observatoires volcanologiques en Martinique et les stations de biologie tropicale en Guyane, aux observatoires astronomiques, aux stations polaires (Arctique et Antarctique), aux îles des TAAF, aux stations météorologiques, aux stations archéologiques au Maghreb. La comparaison se fera également entre les périodes historiques, les zones géographiques, les disciplines, puis la ” nationalité ” de ces infrastructures au-delà des territoires français d’outre-mer qui restent le centre d’intérêt de SciOUTPOST.
Coordination scientifique : David Dumoulin (Centre de Recherche et de Documentation sur les Amériques)
ERC – THE SUBSEQUENT LIVES OF ARAB REVOLUTIONARIES
What has become of the men and women, more often ordinary people than experienced activists, who brought about the Arab revolutions of 2011, ten years following the first wave of protests? What remains of their commitment to freedom, social justice and dignity, and the bonds and networks of friendships they forged during the revolutionary moment? What of their “subsequent lives” (Fillieule et al., 2018) and the structures and institutions they created ? What are the “emotional legacies” (Nussio, 2012) of their participation in the revolutionary processes of 2011? In sum, what are the biographical consequences and the social outcomes of revolutionary activism when the revolutionary moment becomes a civil war (Syria), an “authoritarian restoration” (Egypt), a fragile and tense democratic transition (Tunisia), or a return to the former “years of lead” (Morocco)?At odds with the generalized idea of a “lost decade” and that of the “failure” of the Arab uprisings, the main hypothesis of this project is that despite the fact that most Arab revolutionary processes have not (yet) succeeded in accomplishing their initial goals of political liberalization and social justice, that violence and repression have indeed increased in the region, and that feelings of failure, frustration and trauma are generalized among Arab revolutionaries whose “activist careers” (Fillieule, 2001) have on many occasions been interrupted or put on hold, the “subsequent lives” of the latter reveal that a major disruption took place in 2011 and that its biographical consequences, “emotional legacies” and social outcomes will be multi-fold, long-lasting and nourish the new generations of Arab citizenry.
In this perspective, the revolutionary process, instead of necessarily leading to a successful radical political rupture, is conceived of here as one that produces a more diffuse reconfiguration of individual and collective social practices, representations and interactions.
What is more, acting as “micro-social change entrepreneurs” (Fillieule and Neveu 2019), these revolutionaries contribute to shape broader socio-political dynamics, thereby generating meaningful change through their everyday actions (Bayat, 2013).
The revolutionary phase initiated in 2011 has not been closed; beyond what has often been portrayed as an “Arab winter”, the different societies of the MENA (Middle East and North Africa) region have shifted towards a new reality whose long-term transformations are yet to come and need to be documented.Building on the previous research experience of the PI and the team members, this project develops an ambitious analytical approach that focuses on the “subsequent lives” of the ordinary, meaning “run-of-the-mill” (Giugni and Grasso, 2016), not experienced, prominent or newsworthy, Arab revolutionaries.
It aims at analyzing the impacts of revolutionary activism on the biographical trajectories of these citizens in their private, activist, professional, affective, relational and organisational lives.In order to achieve the above, LIVE-AR follows a multi-layered research design that simultaneously articulates the micro and meso levels and focuses on four highly contrasted case-studies: Morocco, Tunisia, Egypt and Syria. In so doing it proposes a three-fold shift in the usual analysis :
a) from the revolutionary moment to the “subsequent lives” and a longitudinal analysis (temporality) ;
b) from the institutions and macro-political transformations to the ordinary activists and the individual level (structure/agency); and
c) from national studies to cross-national comparison in order to comprehend variations depending on the political context (reinforced authoritarianism in the case of Morocco, difficult transition to democracy in Tunisia, authoritarian restoration after a revolutionary moment in Egypt, and war in the case of Syria) (spatiality and scope).
The project relies on a highly skilled multidisciplinary team, with extensive experience in the region, as well as on a diversified methodological “toolkit” in phase with a qualitative multidisciplinary approach : biographical interviews are combined with life calendars, an analysis of digital social networks and internet archives, ethnographic observations of daily life practices and encounters, and secondary sources.
Coordinnatrice du projet : Laura Ruiz de Elvira, IRD/CEPED
RÉSEAU D’ÉTUDES MAGHRÉBINES
Ce réseau consacre la collaboration scientifique entre l’École des hautes études hispaniques et ibériques (Casa de Velázquez, Madrid), l’École française de Rome, le Centre Jacques Berque (CJB, Rabat) et l’Institut de recherche sur le Maghreb contemporain (IRMC, Tunis) visant à promouvoir le dialogue interdisciplinaire et la formation doctorale en sciences humaines et sociales des jeunes chercheurs dédiés à l’étude du Maghreb
Programmes de recherche et réseaux passés
LA ROUTES DES EMPIRES

Ces dernières années, des missions archéologiques ont permis de mieux connaitre l’histoire médiévale du Maroc. Ces campagnes de fouilles ont mis la lumière sur des sites majeurs tels Nûl Lamta, la porte Almoravide du Sahara, Igiliz, le berceau de l’empire Almohade, Agadir Oufella, la citadelle Saadienne, ou encore Sijilmâsa, Tamdoult ou Tazagourt, points nodaux du commerce transaharien. La route qui mène de l’Atlantique au Tafilalet, le long des contreforts de l’Atlas, concentrait à l’époque médiévale les enjeux politiques et économiques des dynasties marocaines. Contrôler la rive septentrionale du Sahara permettait de contrôler le fructueux commerce caravanier. Le travail minutieux sur les vestiges matériels et architecturaux de ces cités a permis de replacer le Sud du Pays au cœur des débats scientifiques et des représentations de ce riche passé.
La modélisation 3D de ces sites est tout autant un instrument scientifique de documentation de ces sites archéologiques, qu’un formidable levier de valorisation de ce patrimoine, ouvrant en grand la possibilité de la rendre accessible et visitable par le plus grand nombre. C’est là l’objectif de l’application « la route des empires ». Mobilisant les dernières technologies de modélisation, cette dernière offre au visiteur une consultation libre des contenus 3D, que ce soit en réalité virtuelle (VR) ou réalité augmentée (AR). L’application fonctionne en arborescence, commençant par une présentation générale de l’histoire médiévale du Maroc, avant d’offrir des visites guidées de chacun des sites archéologiques, mobilisant des vidéos, des images, des textes, et in fine, des modélisations 3D à grande échelle. La déambulation du visiteur, d’un site à l’autre, se fait autour d’une carte interactive du présahara marocain.
L’application est ouverte et évolutive. Elle a vocation à accueillir d’autres sites archéologiques médiévaux, voire des collections de sites d’autres périodes historiques. Elle fait la démonstration de tout le potentiel des humanités numériques au service de l’archéologie et du patrimoine.
Pour plus d’informations, consultez le site : https://laroutedesempires.ma
ANR ILM – L’ENSEIGNEMENT DE L’ISLAM AU MAROC (XVIIIE-XXIE)
Au Maroc comme ailleurs, la transmission du savoir (‘ilm) en islam est un élément majeur pour la compréhension de cette religion. Elle participe à l’élaboration des doctrines, des normes, de la « tradition » et, donc, de la mise en place d’orthodoxies concurrentes, dans l’espace clos de la madrasa et au sein du groupe des clercs (oulémas, cheikhs soufis, imams, etc.), mais aussi en dialogue avec le pouvoir et avec la société. L’étudier nous renseigne sur les modalités d’inscription du religieux dans la société, sur son lien avec l’économie et sur son rapport au politique. Les relations internationales en sont imprégnées : depuis les pérégrinations des clercs dans leur quête du savoir (talab al-‘ilm) jusqu’au transnationalisme actuel, l’enseignement de l’islam s’ancre profondément dans le local, qu’il soit rural ou urbain, tout en se projetant dans une communauté des croyants (umma) aujourd’hui globalisée. Après les observations des administrateurs coloniaux et des orientalistes, puis des travaux de références sur le modèle classique de l’enseignement en islam, un regain d’attention fut porté au sujet dans les années 2000 mais le Maghreb, et le Maroc en particulier, furent négligés. Le projet ILM vise à pallier ce manque au moment où l’enseignement de l’islam en Europe comme dans les pays pourvoyeurs d’immigration est considérée comme cruciale. L’objectif du programme est d’explorer le terrain de l’enseignement de l’islam au Maroc depuis le 18e siècle, de l’apprentissage du Coran des « simples croyants » à la formation des oulémas et du personnel religieux. On croisera les disciplines et les périodes, on conjuguera islamologie/philologie et sciences sociales (histoire, géographie, anthropologie, sociologie, science politique), en faisant dialoguer les chercheurs marocains et internationaux, afin de décloisonner le champ. L’enseignement de l’islam recouvre ici des réalités très diverses – d’autant que la démarche est à la fois diachronique et synchronique – que seul un programme d’une telle ampleur, regroupant une trentaine de participants peut parvenir à saisir. L’ambition est de renouveler les connaissances en mettant au jour de nouvelles sources et en menant des enquêtes sur des terrains méconnus. Le projet questionnera d’abord le savoir religieux lui-même pour déterminer comment s’articulent toutes ses formes, entre enseignement soufi, sciences religieuses islamiques, sciences humaines « annexes », savoir encyclopédique, etc. Les modalités de la transmission de ce savoir constituent la seconde thématique : des enquêtes seront menées dans différentes régions sur les écoles traditionnelles (madrasa ‘atîqa, mhadara) comme sur les grands centres de savoir, puis les universités modernes, mais aussi des confréries soufies, des associations ou mouvements religieux. La troisième thématique s’articulera autour de la sécularisation du savoir et de son enseignement qui, au Maroc, commença sous le protectorat, impulsée par l’État colonial mais aussi par les nationalistes marocains, et se poursuivit après 1956. L’État indépendant échafauda un dispositif organisant l’enseignement religieux, au fil de ses besoins, qui a constitué un outil de l’exercice du pouvoir et s’intègre dans ses politiques publiques comme dans le soft power vers l’étranger. La quatrième thématique envisage l’État marocain comme un producteur et un exportateur de savoir, mais aussi comme le récepteur d’un savoir importé. Malgré le discours prônant le « modèle marocain », un islam malékite-soufi-tolérant, il existe des offres diverses qui véhiculent des orthodoxies concurrentes. Du 18e siècle jusqu’à nos jours, le Maroc a reçu des influences venues d’Orient (wahhâbisme, « salafisme ») qui seront documentées et discutées. Trois corpus de textes seront publiés pour documenter ce projet : une anthologie de textes de la période coloniale, en français ; une anthologie de textes arabes écrits par les acteurs de la réforme de l’enseignement ; des manuscrits en arabe.
Coordination scientifique : Sabrina Mervin (Iremam)
GLOBAFRICA

Porté par l’USR 3336, GLOBAFRICA est un programme d’histoire qui entend repenser l’intégration de l’Afrique avec le reste du Monde sur la longue durée. Ce projet multidisciplinaire propose ainsi de fonder de nouveaux outils pour donner une vision équilibrée des connexions qui reliaient l’Afrique aux autres continents avant la traite du XVIIIe et le colonialisme du XIXe siècle – une vision aussi éloignée du postulat simpliste d’une Afrique isolée que de la réification à outrance de connexions encore largement méconnues. Des phénomènes tels que les dynamiques de peuplement, les crises démographiques et épidémiologiques mais aussi la complexification sociale et les formations étatiques ou culturelles sont donc abordés sous l’angle des échanges intercontinentaux. Pour ce faire, l’attention portera tout particulièrement sur les relations entre, d’une part, les interfaces océaniques et saharienne, et, d’autre part, les configurations politiques et sociales de l’intérieur du continent. Jusqu’où, jusqu’à quel point et à partir de quand faut-il considérer le continent africain comme intégré au reste du monde ?
D’un point de vue théorique, GLOBAFRICA ambitionne donc de compléter le seul modèle commercial des échanges et de complexifier, par une démarche pluridisciplinaire inédite – mêlant lecture ou relecture de sources écrites anciennes, travail sur des collections archéologiques existantes ou en cours d’élaboration, et apports des sciences dures (paléo-botanique, génétique ou chimie) – nos outils pour appréhender des « connexions » : que ce soit de nouveaux éléments, tels que la culture matérielle, les textes ou les éléments environnementaux, ou de nouvelles évidences, telles que les épidémies, qui battent en brèche l’idée d’isolement. En déportant l’attention sur les sociétés de l’intérieur et leurs interactions avec les interfaces du continent, GLOBAFRICA permettra ainsi de dépasser les grands récits euro- mais aussi indo- ou islamo-centrés de stimuli extérieurs, qui restent trop souvent les éléments explicatifs des dynamiques historiques africaines, et de leur substituer une vision équilibrée et une périodisation propre à une « mondialisation africaine ».
Coordination scientifique : Adrien Delmas (Science Po, Paris)